MAROC : Violation du droit syndical à la société Franco-Italienne STMicroelectronics à RABAT.

Publié le par Voix Des Travailleurs ( V D T )

A Monsieur Patrice Chastagner ,

Vice-Président et Directeur des Ressources Humaines de la société STMicroelectronics.

Objet : Violation du droit syndical à STMicroelectronics-Rabat

Réf. : Votre lettre datée du 10/08/2005 aux syndicats français et italiens

Monsieur,

Permettez nous de réagir à votre lettre sous-référence en réponse à la lettre ouverte que vous ont adressée les syndicats français et italiens ( CFDT, CFTC, CGC, CGT, FO, FIM, CSIL Brianza, FIOM-CGIL Milano e Nazionale, RSU Agrate e Castelletto ) au sujet du conflit social à STMicroelectronics à Rabat : 1 - Préalablement, nous exprimons notre satisfaction quant à votre volonté de développer un dialogue constructif avec les syndicats, et nous confirmons que l’UMT, qui jouit parmis le mouvement syndical international, d’une bonne réputation et d’une grande estime,ne peut tolèrer qu’un de ses adhérents, à STMicroelectronics ou ailleurs, use du droit syndical pour manquer à ses engagements professionnels. De même, nous refusons que les libertés syndicales soient violées à STMicroelectronics sous des prétextes "professionnels". 2 - Nous sommes convaincus que le licenciement de nos collègues Rachid Boukhari et Nabil Chiadmi constitue une atteinte au droit syndical et confirme l’interdiction de toute activité syndicale indépendante à STMicroelectronics-Rabat comme en témoignent les faits suivants : a/ le 13/07/2005, des dizaines de salariés du centre de conception et de recherche de Rabat ont constitué leur syndicat affilié à l’UMT conformément à l’article 414 du Code du travail marocain. La direction locale qui n’avait jamais informé, ni les salariés concernés, ni l’inspecteur du travail d’une quelconque faute professionnelle, a mené une campagne pour obliger les nouveaux responsables syndicaux à démissionner du syndicat, en leur fixant la date du 25/07/2005 comme ultimatum. b/ Pressée de vouloir éradiquer le syndicat, la direction locale a omis d’appliquer la législation du travail,notamment l’article 62 du Code qui donne au salarié le droit de "...se défendre et être entendu par l’employeur ou le représentant de celui-ci en présence du délégué des salariés ou le représentant syndical dans l’entreprise qu’il choisit lui-même dans un délai ne dépassant pas huit jours à compter de la date de constatation de l’acte qui lui est imputé..." . Ce même droit est garanti par la convention internationale n° 158 de l’OIT ratifiée par leMaroc. c/ Nous sommes ahuris par votre affirmation que "...les licenciements dont il est fait état sont justifiés pour des raisons professionnelles sérieuses, liées surtout à l’attitude des deux salariés vis-à-vis de leur travail, faits qui sont largement antérieurs au mois de juillet 2005..." ;et que la direction locale ait attendu leur adhésion au syndicat pour prendre la décision de les sanctionner. d/ Le refus par la direction locale d’assister à deux reprises (les 01 et 02/08/2005) à la réunion de conciliation provoquée par l’inspecteur du travail conformément à l’article 551 du Code, témoigne de son refus catégorique de reconnaître le droit d’organisation et de négociation collective aux salariés de STMicroelectronics à Rabat (voir PV rédigé par l’inspecteur du travail). e/ Lors d’une réunion tenue à la Wilaya de Rabat le 12/08/2005, la directrice des Ressources Humaines du centre de conception et recherche Madame ILHAM EL GAF a informé l’assistance que d’autres membres auraient démissionné du syndicat. Ce qui témoigne du climat de terreur qui règne actuellement dans ce centre et que les salariés sont, de plus en plus,convaincus que le droit syndical est interdit à STMicroelectronics à Rabat. 3 - Monsieur Chastagner, Dans votre lettre vous considérez que le licenciement des syndicalistes Rachid Boukhari et Nabil Chiadmi est justifié par des raisons professionnelles .Ce qui appelle les clarifications suivantes :

-Nos collègues Rachid Boukhari et Nabil Chiadmi occupaient respectivement les postes de responsable du service Informatique et responsable du service Réseau et Télécom et qu’ils avaient géré des budgets de plusieurs millions de dollards US. Tout récemment, ils avaient, tous les deux, reçu des lettres de félicitations de la direction locale, en reconnaissance de leur sérieux au travail.

- Dans la précipitation, la direction locale a violé les dispositions du code de travail relatives aux sanctions disciplinaires notamment les articles 38, 62 et 64 qui stipulent :

Article38 : L’employeur applique les sanctions disciplinaires graduellement. Lorsque les sanctions disciplinaires sont épuisées dans l’année, l’employeur peut procéder au licenciement du salarié. Dans ce cas, le licenciement est considéré comme justifié. Article62 : Avant le licenciement du salarié, il doit pouvoir se défendre et être entendu par l’employeur ou le représentant de celui-ci en présence du délégué des salariés ou le représentant syndical dans l’entreprise qu’il choisit lui-même dans un délai ne dépassant pas huit jours à compter de la date de constatation de l’acte qui lui est imputé. Il est dressé un procès-verbal à ce propos par l’administration de l’entreprise, signé par les deux parties, dont copie est délivrée au salarié. Si l’une des parties refuse d’entreprendre ou de poursuivre la procédure, il est fait recours à l’inspecteur de travail. Article 64 :Une copie de la décision de licenciement ou de la lettre de démission est adressée à l’agent chargé de l’inspection du travail. La décision de licenciement doit comporter les motifs justifiant le licenciement du salarié, la date à laquelle il a été entendu et être assortie du procès-verbal visé à l’article 62 ci-dessus...." Aucune de ces dispositions n’a été respectée par la direction locale de ST Rabat. Il en résulte bien évidemment que, outre le caractère abusif de ces licenciements, ils sont illégaux. 4 - Vous dites aussi que l’UMT n’est pas le syndicat le plus représentatif à STMicroeletronics-Rabat, parce que la direction locale n’a jamais organisé les élections des délégués du personnel. En effet notre syndicat ne prétend pas encore être le plus représentatif dans cette entreprise, bien qu’il y soit le syndicat UNIQUE. Mais le fait que STMicroelectronics refuse d’organiser les élections des délégués du personnel constitue une infraction sanctionnée par le Code et ne prive pas l’UMT de son droit à l’existence garanti par la législation internationale du travail, la Constitution marocaine et par le Code du travail qui stipule dans son article 398 que "des syndicats professionnels peuvent être librement constitués ...indépendamment du nombre des salariés dans l’entreprise ou dans l’établissement. Les employeurs et les salariés peuvent adhérer librement au syndicat professionnel de leur choix..." Vous n’êtes pas sans savoir que le droit des salariés à constituer un syndicat et d’y adhérer librement est un des droits fondamentaux garantis par les normes internationales du travail notamment : la Constitution de l’OIT (1919), la déclaration de Philadelphie (1944), la Déclaration Universelle des Droits Humains (1948), le Pacte International sur les Droits Economiques Sociaux et Culturels (1966), le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques (1966), les conventions internationales de l’OIT numéros 87, 98 et 135, la Déclaration Internationale sur les Principes et Droits Fondamentaux au Travail(1998),etc. 5 - Nous accueillons avec cordialité votre décision de vous conformer finalement au Code du travail marocain et d’organiser les élections des délégués du personnel. Mais nous souhaitons que ces élections soient réellement libres et transparentes et que les salariés puissent choisir librement leurs représentants. En d’autres termes, que le droit syndical soit reconnu à STMicroelectronics, que toutes les mesures anti-syndicales prises par la direction locale soient annulées et que les syndicalistes licenciés arbitrairement soient réintégrés dans leurs postes. Monsieur Chastagner, Nous vous confirmons notre volonté de nouer avec votre société des relations responsables marquées par le respect et la confiance. Mais nous considérons qu’en tenant à licencier nos collègues, la direction locale déclare l’interdiction de l’UMT qui n’a fait que réclamer l’application de la législation du travail. Votre volonté de respecter les libertés syndicales partout où la Société est implantée, restera défectueuse si la direction locale persiste dans sa politique hostile au droit syndical et continue de menacer de licenciement les adhérents de l’UMT. Nous resterons confiants dans votre sagesse pour mettre fin à cette tension inutile à STMicroelectronics à Rabat.

Veuillez agréer nos sentiments les plus sincères

Pour le Bureau Régional de l’UMT

La secrétaire générale : Khadija RHAMIRI

 

Publié dans voixdestravailleurs

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article